Venezuela: le siège du journal d'opposition El Nacional remis à une figure du pouvoir
La justice vénézuélienne a officiellement remis le siège du journal El Nacional à Diosdado Cabello, souvent considéré comme le numéro 2 du pouvoir, qui a gagné un procès en diffamation contre ce quotidien critique du gouvernement et des autorités.
"La propriété du siège d'El Nacional et les terrains sur lesquels il est construit ont été directement attribués à Diosdado Cabello" (...) lors d'une vente aux enchères judiciaire irrégulière et clandestine", indique un communiqué de presse du journal lundi.
Le journal assure que cette attribution s'est réalisée "sans que les affiches de la vente aux enchères aient été publiées et sans que le montant minimum pour que les parties intéressées fassent leurs offres aient été rendues publics".
Le siège du Nacional a été saisi en mai. En avril, la justice vénézuélienne a condamné le quotidien à verser 13,4 millions de dollars pour avoir causé un "grave préjudice moral" à Diosdado Cabello, député et numéro deux du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) au pouvoir.
Cette condamnation est la suite judiciaire d'une plainte déposée en 2015 par Diosdado Cabello contre El Nacional à la suite de la reproduction d'un article du journal espagnol ABC qui le liait au trafic de drogue. Parallèlement, il avait porté plainte contre ABC en Espagne et le Wall Street Journal aux Etats-Unis. Ces deux plaintes ont été rejetées.
Après avoir déposé la plainte, le puissant dirigeant avait lancé plusieurs menaces au média et promis de le transformer en université ou d'utiliser son terrain pour la construction de logements populaires.
"Je ne veux pas d'argent pour moi", avait déclaré Cabello.
La Société interaméricaine de presse (SIP) a estimé qu'il s'agissait "vol du siècle du journalisme indépendant".
El Nacional, journal emblématique fondé en 1943 par l'écrivain vénézuélien Miguel Otero Silva, a cessé de circuler en édition imprimée en décembre 2018, après 75 ans d'histoire, dont deux décennies d'opposition au gouvernements de Hugo Chavez (1999-2013) et son successeur Nicolas Maduro.
Plus d'une centaine de médias ont fermé depuis l'arrivée au pouvoir de Maduro, dénonce l'ONG Espacio Publico.
R.Schiltz--LiLuX