Le procès de l'assassinat du père Hamel par des jihadistes s'est ouvert à Paris
Le procès de l'attentat jihadiste de Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine-Maritime) s'est ouvert lundi à Paris près de six ans après l'assassinat à coups de couteau du père Hamel en pleine messe, qui avait provoqué l'effroi au-delà des frontières françaises.
Les auteurs des coups, Adel Kermiche et Abdel-Malik Petitjean, 19 ans tous les deux, qui se réclamaient du groupe État islamique (EI), avaient été tués par la police à leur sortie de la petite église de la banlieue de Rouen, le 26 juillet 2016.
Proches des accusés, les trois hommes présents dans le box de la cour d'assises spéciale de Paris, Jean-Philippe Jean Louis, Farid Khelil et Yassine Sebaihia, comparaissent pour "association de malfaiteurs terroriste" et encourent trente ans de réclusion criminelle.
Ils sont soupçonnés d'avoir été au courant de leurs projets, d'avoir partagé leur idéologie ou tenté de rejoindre la Syrie.
Le président de la cour, Franck Zientara, a ouvert les débats en confirmant que le quatrième accusé, Rachid Kassim, instigateur présumé de l'attaque, serait jugé en son absence.
Ce propagandiste français de l'EI est présumé mort dans un bombardement en Irak en février 2017. Il est le seul à être mis en examen pour complicité de l'assassinat du prêtre et la tentative d'assassinat d'un paroissien, accusé d'avoir "sciemment encouragé et facilité le passage à l'acte" des deux jihadistes.
- "Comprendre" -
Malgré l'absence des principaux responsables, les victimes et leurs proches espèrent que l'audience, prévue pour près de quatre semaines, aidera à la "compréhension" de ce qui s'est passé.
Présent lundi à l'audience, Guy Coponet, qui assistait à la messe avec sa femme et avait été grièvement blessé, a souhaité que le procès permette "que ça se termine de bonne façon".
"Si ceux qui sont responsables pouvaient demander pardon à tous ceux à qui ils ont fait de la peine, je pense qu'on aura gagné notre journée", a-t-il ajouté à l'AFP.
Aujourd'hui âgé de 92 ans, M. Coponet il "veut comprendre, à travers le procès, comment des jeunes tout juste sortis de l'adolescence en sont arrivés à commettre de telles horreurs", avait expliqué à l'AFP son avocat, Me Méhana Mouhou.
En revanche, les trois religieuses aussi présentes à la messe ont fait parvenir un certificat médical attestant qu'elles n'étaient pas en état de venir témoigner.
"On attend que la vérité soit dite sur le manque de moyens qui n'a pu être donné aux forces publiques pour éviter ce massacre sur le corps de mon frère", a déclaré lundi l'une des sœurs du père Jacques Hamel, Roseline.
L'un des assassins était placé sous bracelet électronique au moment de l'attentat, après un départ avorté vers la Syrie.
"Il faut que la justice soit rendue et la vérité connue (...) pour la famille du père Hamel (...) pour ceux qui ont vécu ces heures tragiques. Il le faut aussi pour les accusés et leurs proches", a estimé lundi dans un communiqué la Conférence des évêques de France.
- "Coupables de quoi ?" -
L'archevêque de Rouen, Mgr Dominique Lebrun, s'est lui aussi interrogé auprès de l'AFP sur la responsabilité des trois accusés "détenus depuis cinq ans": "Sont-ils coupables ? De quoi ?"
Pour Béranger Tourné, avocat de Jean-Philippe Jean Louis, la réponse est claire: ces trois accusés ne sont "que trois lampistes (...) que l'on tente de raccrocher" de façon artificielle à l'attentat.
L'accusation décrit son client, âgé de 25 ans aujourd'hui, comme "très actif dans la jihadosphère", via l'administration d'une chaîne Telegram pro-EI et la création de cagnottes en ligne pour soutenir des personnes de "la mouvance islamiste radicale".
Quelques semaines avant l'attentat, il s'était rendu en Turquie avec Abdel-Malik Petitjean, pour, selon l'accusation, rejoindre la Syrie.
Farid Khelil, cousin d'Abdel-Malik Petitjean, est lui présenté comme fasciné par les discours jihadistes. Également en contact avec Rachid Kassim sur Telegram, il aurait soutenu les velléités d'action violente de son cousin.
Ce Nancéien aujourd'hui âgé de 36 ans "n'était pas du tout au courant du projet criminel de son cousin" et "conteste avoir partagé son idéologie", assure au contraire à l'AFP son avocat, Me Simon Clemenceau.
Quant à Yassine Sabaihia, 27 ans, qui avait brièvement rejoint les deux terroristes à Saint-Etienne-du-Rouvray le 24 juillet, avant de rentrer à Toulouse, "il ne savait pas ce qui était en train de se préparer", affirme son avocate, Me Katy Mira, espérant que le procès "fera le jour sur la non implication" de son client.
P.Braun--LiLuX