Ukraine: La Russie maintient la pression dans l'Est, la Finlande aux portes de l'Otan
La pression russe reste forte dimanche dans l'est de l'Ukraine, visé par plusieurs frappes de missiles, alors que la Finlande a annoncé une candidature historique à l'Otan, une "erreur" selon Moscou qui a menacé de représailles.
Des missiles russes de "haute précision" ont visé dans la nuit deux points de commandement ukrainiens et quatre dépôts de munitions d’artillerie près de Zaporijjia, Paraskovievka, Konstantinovka et Novomikhaïlovka dans la République populaire de Donetsk, selon le ministère russe de la Défense dimanche.
L’aviation russe a elle détruit deux lance-missiles des systèmes S-300 et un système radar dans la région de Soumy. Les systèmes de défense anti-aérienne russes ont détruit eux 15 drones ukrainiens dans les régions de Donetsk et de Lougansk, a-t-il ajouté.
De leur côté, les services de renseignement militaires britanniques ont affirmé dimanche que la Russie avait subi d'énormes pertes.
Prédisant qu'elle allait s'enliser dans sa tentative de conquête de l'est du pays face à la forte résistance ukrainienne, les renseignements britanniques ont estimé que l'offensive russe dans la région du Donbass, dans l'est de l'Ukraine, a "perdu de son élan".
"La Russie a maintenant probablement subi des pertes d'un tiers de la force de combat terrestre qu'elle a engagée en février", ont-elles ajouté. "Dans les conditions actuelles, il est peu probable que la Russie accélère considérablement son rythme de progression au cours des 30 prochains jours".
- Rencontre Blinken/Kouleba-
Cette évaluation intervient alors que la Finlande a annoncé dimanche qu'elle allait demander son adhésion à l'Otan, conséquence de l'invasion de l'Ukraine.
"C'est un jour historique. Une nouvelle ère s'ouvre", a affirmé le président finlandais Sauli Niinistö.
Samedi, le président finlandais avait appelé son homologue russe Vladimir Poutine pour l'informer de la demande d'adhésion imminente de son pays. Le président russe lui a signifié qu'adhérer à l'Otan "serait une erreur", jugeant qu'il "n'y a aucune menace à la sécurité de la Finlande", selon le Kremlin.
Auparavant, le Kremlin a menacé de représailles "militaro-techniques" sans préciser lesquelles.
Dans la nuit de vendredi à samedi, l'exportation d'électricité à la Finlande - environ 10% de la consommation du pays nordique - a été suspendue.
A Berlin pour la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Otan, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a rencontré le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba et a discuté de la dernière assistance américaine en matière de sécurité, a indiqué le département d'Etat.
M. Blinken "a souligné l'engagement durable des Etats-Unis envers la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'Ukraine face à la guerre non provoquée de la Russie", a déclaré le porte-parole du département d'Etat, Ned Price.
M. Blinken, qui dirigera jeudi une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU sur les pénuries alimentaires provoquées par l'invasion russe de l'Ukraine, s'est également entretenu avec M. Kouleba de "la recherche d'une solution pour exporter les céréales ukrainiennes vers les marchés internationaux", a ajouté M. Price.
- L'Eurovision à Marioupol? -
La victoire au concours Eurovision de la chanson de l'Ukraine samedi soir en Italie, grâce au soutien massif des téléspectateurs européens, a été saluée par l'Otan et de nombreux dirigeants européens et a offert un instant de joie aux habitants de Kiev.
Cette victoire "est un petit rayon de bonheur", a affirmé à l'AFP Iryna Vorobey, une entrepreneuse de 35 ans. Le soutien du public européen a été "incroyable", "c'est très important pour nous dans le contexte actuel".
Premier à saluer cette victoire, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré être "sûr que notre choeur victorieux dans la bataille contre l'ennemi n'est pas loin", promettant d'organiser "un jour" l'Eurovision dans une Marioupol "libre, pacifique et reconstruite", en référence à la ville martyre où les derniers combattants ukrainiens sont retranchés dans l'aciérie d'Azovstal.
Le président Zelensky a toutefois souligné que la "situation dans le Donbass reste très difficile. Les troupes russes tentent d'y obtenir au moins une victoire.
Les forces russes s'efforcent de progresser dans cette région stratégique de l'Est, contrôlée en partie par des séparatistes prorusses depuis 2014, et dont Moscou a fait son objectif principal depuis le retrait de ses troupes des environs de Kiev fin mars.
"On se prépare à de grandes offensives à Severodonetsk, et autour de l'axe Lyssytchansk-Bakhmout", a affirmé Serguiï Gaïdaï, gouverneur ukrainien de la région de Lougansk, décrivant une situation humanitaire de plus en plus critique.
"La région de Lougansk est constamment sous un feu chaotique (...) il n'y a absolument ni gaz, ni eau ni électricité", a-t-il affirmé samedi soir.
Les Russes tentent notamment depuis trois semaines, sans succès, de franchir la rivière Severskyi Donets, au niveau du village de Bilogorivka.
- Inscription Azov-
Dans ce village quasi désert, une équipe de l'AFP a vu les routes jonchées d'équipements militaires abandonnés. Il ne restait que trois coins couverts de suie d'une école bombardée il y a une semaine, une frappe que Kiev présente comme l'un des plus graves crimes commis par les forces russes depuis le début de leur invasion de l'Ukraine, avec 60 civils tués.
Dans un autre village libéré près de Kharkiv, les stigmates de la violence des combats qui ont vu les Ukrainiens repousser les Russes en direction de leur frontière et reprendre des villages occupés depuis le début de l'invasion ordonnée par Moscou sont partout.
Selon les habitants, la bataille de reprise de Vilkhivka a eu lieu fin mars, mais l'armée ukrainienne interdisait l'accès à la zone jusqu'à il y a quelques jours.
Symboliquement, l'inscription "Azov était là", avec le symbole du régiment ukrainien ressemblant à la croix gammée nazie, a été apposé sur un des chars à côté du "Z" qui y avait été peint par les troupes russes.
Des dizaines de maisons de ce village d'environ 2.000 habitants ont été éventrées par des obus, des explosions ou des incendies. On y découvre des habits, des jouets d'enfants, des appareils ménagers.... Les rues sont jonchées de débris, douilles de balles et autres restes de munitions.
Selon un responsable américain de la Défense sous couvert d'anonymat, les Russes ne parviennent pas à faire de "prise significative" dans l'est.
La situation semble avoir basculé autour de Kharkiv, deuxième ville du pays. Les forces russes ont dû se retirer de plusieurs localités au nord-est de la ville, selon l'état-major ukrainien.
Cependant, selon l'Institut américain d'étude de la guerre (ISW), "l'Ukraine et ses partenaires occidentaux ne disposent probablement que d'une fenêtre d'opportunité réduite pour appuyer une contre-offensive dans les territoires occupés" par la Russie. Vladimir Poutine "entend probablement annexer le sud et l'est de l'Ukraine à la Fédération de Russie dans les prochains mois".
Kiev affirme que ses troupes ont tué près de 20. 000 militaires russes. Le 25 mars, Moscou avait déclaré que ses forces avaient tué au moins 14 000 militaires ukrainiens. Mais les deux chiffres sont largement suspectés d'être gonflés et n'ont pas été vérifiés par l'AFP ou des observateurs indépendants.
E.Klein--LiLuX