A bord des "trains de la colère", "l'exaspération" des usagers de lignes SNCF oubliées
Des centaines d'élus et usagers des lignes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) et Paris-Clermont-Ferrand se sont rassemblés mardi en milieu de journée à leur arrivée à la gare d'Austerlitz à Paris pour dire leur "exaspération" face à l'état "dégradé" de ces lignes.
Dénonçant "40 ans d'inaction" sur ces deux lignes oubliées, nombre d'entre eux avaient pris tôt le matin l'un des deux "trains de la colère", à Cahors ou Clermont, pour gagner Paris, où une délégation doit être reçue mardi après-midi au ministère des Transports.
La journée avait commencé à l'aube dans le Lot, quand les premiers manifestants avaient pris le train à Cahors. "Tous unis pour une desserte ferroviaire dynamique respectueuse des usagers et de nos territoires", pouvait-on lire sur une banderole déployée à la gare, a constaté l'AFP.
"Je suis venu défendre la ligne historique Paris-Toulouse", déclare Francesco Testa, conseiller municipal de Cahors, avant d'ajouter: "Comme on a affaire à des malentendants, on se déplace pour être plus près de leurs oreilles."
Pour ce trajet de plus de 11 heures aller-retour dans la même journée, il avait prévu de quoi se sustenter: "du jambon, du pain et du vin de Cahors".
Avant de monter à bord, Monique Codet, 84 ans, qui a fait le trajet "Montauban-Cahors pendant 14 ans", confie qu'elle aimerait que les nouvelles générations aient les mêmes conditions de transport qu'elle a connues: "Il n'y avait pas de retard. Je me souviens d'une seule panne".
- "Des rames hors d'âge" -
Au passage du train à Limoges, où une centaine de manifestants mécontents ont scandé "ras-le-POLT" dans le hall de la gare, le maire de la ville (LR) Emile Roger Lombertie a estimé "plus facile aujourd'hui pour un étudiant d'aller faire ses études à Bruxelles, à Berlin, à Copenhague ou ailleurs, que d'aller entre Limoges et Clermont-Ferrand".
A Clermont-Ferrand, environ 130 personnes ont pris le train, a constaté une journaliste de l'AFP.
"Les choses se sont aggravées depuis 40 ans avec des rames hors d'âge et un temps de trajet qui a augmenté de 40 minutes", explique Patrick Wolff, président de l'association Objectif capitales qui réclame un objectif de "moins de trois heures" pour rejoindre Paris contre trois heures et quinze minutes actuellement.
Jean-Philippe Ollier, responsable du projet de réhabilitation du parc Cataroux de Michelin, à Clermont, "vient défendre la capacité de pouvoir aller à Paris de manière fiable. Le parc Cataroux, c'est 400.000 visiteurs et énormément d'entreprises qui vont s'installer et travailler avec l'écosystème parisien", souligne-t-il.
- "Axes stratégiques"-
Les lignes POLT (plus de 700 km de voie ferrée) et Clermont-Paris (420 km) transportent respectivement 2,6 et 1,9 millions de voyageurs chaque année dans des trains Intercités.
La SNCF a lancé en 2018 un programme de modernisation de ces lignes, qui restent cependant "encore équipées d'installations techniques hétérogènes et vieillissantes", reconnaît la compagnie ferroviaire.
"En modernisant ces deux axes stratégiques", la SNCF, qui prévoit "des investissements sans précédent", compte rendre les "trajets plus rapides, plus fiables et plus accessibles".
Selon le ministère des Transports, ces "investissements significatifs réalisés depuis 2018" incluent 1,9 milliard d’euros à l'horizon 2027 pour la ligne POLT et près d'un milliard pour Paris-Clermont. "Il s’agit des deux plus gros chantiers conduits cette année par SNCF Réseau", souligne-t-il mardi dans un communiqué.
"Une régénération partielle qui pour nous n'est pas suffisante", dénonce Jean-Noël Boisseleau, vice-président de l'association Urgence Ligne POLT. Pour lui, il faudrait "2,5 à 3 milliards d'euros supplémentaires pour que, vraiment, on reparte pratiquement à neuf".
R.Schiltz--LiLuX