Inondations en Espagne: le président de région admet des "erreurs", mais refuse de démissionner
Admettant des "erreurs", mais excluant de démissionner, le président de la région espagnole de Valence a longuement justifié vendredi son action lors des inondations meurtrières du 29 octobre, critiquant aussi le gouvernement central de Pedro Sánchez et les organismes qui en dépendent.
"Je ne vais pas nier (qu'il y a eu) des erreurs", a déclaré Carlos Mazón, membre du Parti populaire (PP, droite conservatrice), au cours d'un discours de près de deux heures et demie prononcé au parlement régional de Valence (sud-est), devant lequel une centaine de manifestants ont scandé "Menteur!" et "Assassin!".
"Je veux présenter mes excuses" aux gens qui ont eu "le sentiment que l'aide n'arrivait pas ou n'était pas suffisante", a déclaré M. Mazón au cours de ce discours destiné à rendre compte de sa réaction face à cette crise sans précédent, dont le bilan provisoire était vendredi de 224 morts, dont 216 dans la seule région de Valence.
"Je ne vais éluder aucune responsabilité", a-t-il assuré, critiquant indirectement le gouvernement du socialiste Pedro Sánchez en fustigeant "ceux qui se retranchent derrière des interprétations sur les compétences réglementaires et les petits caractères de règlements et de lois pour ne pas faire leur autocritique".
"Je crois que nous avons fait notre autocritique, je ne vous ai pas entendu faire le moindre reproche, même minime, au gouvernement central d'Espagne, à ses organismes", a-t-il ensuite rétorqué aux critiques de l'opposition de gauche qui ont suivi son discours.
"J'assume ma responsabilité, mais maintenant j'attends que Pedro Sánchez (...) soit à la hauteur", a-t-il lancé, annonçant par ailleurs que son parti avait demandé la création d'une commission d'enquête au parlement régional.
- "Les pires inondations depuis 1962" -
Depuis les inondations du 29 octobre, la réaction de M. Mazón et de son administration régionale - dans la gestion de l'alerte comme dans celle des secours - est fustigée par de très nombreux sinistrés. 130.000 personnes ont ainsi défilé à Valence samedi dernier pour critiquer les autorités, en particulier M. Mazón.
Ce dernier avait aussi été pris à partie par une foule de manifestants dans la localité de Paiporta, près de Valence, le 3 novembre, lors d'une visite très tendue du roi Felipe VI et de la reine Letizia, accompagnés de Pedro Sánchez.
En Espagne, pays très décentralisé, la gestion des catastrophes relève de la responsabilité des régions, mais le gouvernement central, chargé d'émettre les alertes via l'Aemet (Agence météorologique nationale), peut fournir des ressources et prendre la main dans des cas extrêmes.
Faisant un compte-rendu très long et très détaillé de tous les événements de la journée du 29 octobre, M. Mazón a rappelé que ce jour-là avaient eu lieu "les pires inondations que l'Espagne a subies depuis 1962", suggérant que personne ne pouvait prévoir une catastrophe d'une telle importance.
Ce n'est qu'après 20H00, soit plus de 12 heures après la première alerte rouge lancée par l'Aemet, que ses services avaient envoyé sur les téléphones portables des habitants un message leur demandant de rester chez eux ou d'y rentrer sans tarder.
Mais à ce moment-là, de nombreuses localités étaient déjà inondées, leurs habitants avaient de l'eau jusqu'aux genoux ou jusqu'à la ceinture et des centaines de personnes étaient coincées sur les routes dans leurs véhicules. Beaucoup n'avaient pas pu être sauvées.
- Information "fragmentée" -
Se référant à cette alerte rouge de l'Aemet, M. Mazón en a minimisé l'importance, affirmant que ce genre d'alertes s'était "produit à 36 reprises durant les 10 dernières années sans qu'aucune d'entre elles ne soit suivie d'inondations brutales comme celles" du mois dernier.
"Beaucoup de ces alertes n'ont même pas résulté en des inondations notables", a-t-il ajouté, déplorant, en outre, une information "fragmentée, inexacte et tardive" le jour de la catastrophe et pointant du doigt notamment une agence dépendant du gouvernement central et chargée de surveiller le débit de la Jucar, une rivière locale.
Après son intervention, la porte-parole régionale du Parti socialiste de M. Sánchez a proposé la formation d'un gouvernement "technique" pour mener à bien la reconstruction, assurant que les socialistes le soutiendrait si M. Mazón démissionnait.
Dans ses réponses, ce dernier a rejeté cette solution: "Je veux assumer ma responsabilité (...) et diriger cette reconstruction avec toute ma détermination. Et si je ne suis pas capable de diriger la reconstruction dont Valence a besoin, j'en assumerai les conséquences politiques personnellement, en ne me représentant pas" lors des prochaines élections régionales, prévues pour 2027.
V.Bertemes--LiLuX