La fin surréaliste du procès historique de Donald Trump
La scène semble irréelle: un ex et futur président des Etats-Unis apparaît sur un écran télé et apprend d'un juge new-yorkais qu'il est bien condamné au pénal, mais dispensé de peine.
Quatre ans après avoir quitté la Maison Blanche dans le chaos en janvier 2021 et dix jours avant d'y retourner, le 45e et très bientôt 47e président américain est le premier de l'histoire de son pays à être officiellement un repris de justice.
Pour une affaire de paiements cachés à une star de films X.
La sentence, sans sanction, est aussi symbolique qu'historique et met un terme à des années d'instruction, de recours, d'audiences, de procès et d'appels -- jusqu'à la Cour suprême encore jeudi soir -- grâce à la ténacité du chef du parquet de Manhattan Alvin Bragg et du juge du tribunal pénal Juan Merchan, qui sont allés au bout de la procédure.
Mais la dernière heure du procès s'est achevée dans un mélange d'irréalité et de banalité: Donald Trump, 78 ans, et son avocat Todd Blanche, comparaissant depuis la Floride, filmés en gros plan par une application vidéo et dont les visages s'affichent sur un écran télé installé dans le prétoire.
Visiblement irrité et impatient, le tribun a dénoncé une "honte pour le système" judiciaire de l'Etat de New York, se disant "totalement innocent", devant les dizaines de journalistes, greffiers, policiers, magistrats rassemblés une dernière fois dans une salle d'audience vieillotte et à la lumière blafarde, au 15e étage du tribunal pénal de Manhattan.
- "Très, très injuste" -
Il a répété avoir été "traité de manière très, très injuste", ce qu'il a dit des dizaines de fois, en se présentant comme une victime d'une justice instrumentalisée selon lui par ses adversaires démocrates.
Après lui avoir dit "merci", le juge Merchan a reconnu que "la seule peine légale qui permette d'entériner un jugement de condamnation sans empiéter sur la plus haute fonction du pays est la dispense" de punition.
Après avoir été reconnu coupable le 30 mai dernier par ce même tribunal, Donald Trump est donc condamné pour 34 chefs d'accusation de falsification dans des comptes de campagne, afin de cacher le paiement de 130.000 dollars à la star de films X Stormy Daniels.
Une manœuvre effectuée juste avant la présidentielle de novembre 2016.
Le procureur Joshua Steinglass a rappelé que le dirigeant politique s'était comporté avec "dédain" à l'égard de l'institution judiciaire tout au long de l'instruction et du procès et avait même menacé ses principaux protagonistes.
"De telles menaces sont destinées à avoir un effet glaçant et intimidant sur les gens qui ont la responsabilité de l'application de la loi afin qu'ils redoutent l'immense pouvoir" de l'ancien et futur chef de l'Etat, a tonné M. Steinglass.
Il n'en demeure pas moins vrai, a souligné le procureur, qu'en choisissant de condamner le président des Etats-Unis tout en le dispensant de peine, la justice new-yorkaise a "assuré une sorte d'accomplissement" en bouclant la procédure pénale.
Le juge Merchan a de son côté insisté sur les "circonstances uniques et remarquables" du procès, un "paradoxe en soi" compte tenu du statut du prévenu.
Au bout de 40 minutes, le juge a rendu sa décision.
Celui qui sera le 20 janvier le premier président des Etats-Unis condamné au pénal a alors disparu de l'écran télé et la salle a été évacuée.
P.O.Ferreira--LiLuX