Judo: à la barre, les retrouvailles aigres des ex-amants Alain Schmitt et Margaux Pinot
Les lèvres pincées, les corps et regards fuyants, les judokas Alain Schmitt et Margaux Pinot se sont à nouveau déchirés vendredi au procès en appel de l'entraîneur, avec leurs versions radicalement contradictoires des violences conjugales dont la championne olympique accuse son ex-compagnon.
Durant deux heures et demie devant la cour d'appel de Paris, les deux judokas se sont livrés un ultime combat judiciaire dans cette affaire qui a pris une ampleur médiatique et une coloration sociétale inattendues, après la retentissante relaxe il y a quatre mois de l'entraîneur de 43 ans.
Installés de part et d'autre de l'allée au premier rang d'une salle comble de journalistes et soutiens, les ex-amants se tiennent chacun assis au bout de leur banc, le plus loin possible l'un de l'autre.
Comme au procès de première instance à Bobigny, puis lors de leur bataille médiatique par conférences de presse et plateaux télés interposés, les deux imposants athlètes ont chacun livré un récit contradictoire, embrouillé, des événements de la nuit du 28 novembre 2021 au domicile de Margaux Pinot au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis).
Liés sur les tatamis par une relation d'entraîneur à athlète au club de l'Étoile sportive du Blanc-Mesnil, Alain Schmitt et Margaux Pinot, 28 ans, entretiennent alors depuis 2017 une liaison amoureuse secrète.
Pour, d'après lui, fuir cette relation "fusionnelle, destructrice", selon les termes de l'avocat général, Alain Schmitt a accepté un poste d'entraîneur de l'équipe nationale féminine d'Israël. La nuit des faits, il doit prendre l'avion pour partir vers cette nouvelle vie.
Après une soirée avec des amis, l'ex-membre de l'équipe de France se rend vers deux heures du matin au domicile de Margaux Pinot. Dans ce huis clos intime, le couple se dispute, s'insulte mutuellement.
"Et là, c'est l'explosion", relate à la barre Alain Schmitt, crâne rasé, le torse musclé moulé par un polo vert bouteille.
Selon son récit, folle de rage et de jalousie, Margaux Pinot se jette sur lui. Ils roulent dans l'appartement et se battent à travers les pièces à la façon d'un combat de judo.
- Visage tuméfié -
Les nombreuses ecchymoses constatées les jours suivants sur les deux protagonistes s'expliquent selon lui par des chocs contre des objets ou des murs au cours de cette lutte mais, assure-t-il, aucun n'a porté de coup à l'autre.
"Elle me serre la tête. Elle me dit +attends, attends, Alain, je fais tout ça parce que je t'aime de trop !+. Et là je sors la tête de l'étreinte (...) et je lui dis: +t'as jamais aimé que toi !+"
La présidente se demande comment Margaux Pinot, dont la photo du visage tuméfié a fait scandale et l'a propulsée en victime emblématique des violences conjugales impunies, a pu finir avec des blessures sous les yeux.
- "Pour se cogner à cet endroit-là, c'est compliqué quand même", s'étonne-t-elle.
- "C'est l'hématome qui a coulé", avance Alain Schmitt.
Aujourd'hui, le technicien s'affirme persuadé que les accusations de violences conjugales étaient "quelque chose de prémédité" par Margaux Pinot pour l'empêcher de partir en Israël, et que leur relation ne prenne ainsi fin.
Appelée à témoigner, l'intéressée, les cheveux noués en queue de cheval, se voûte au-dessus de la barre pour parler dans le micro. D'une petite voix, elle narre une scène autrement différente, un déferlement de violence de la part de son compagnon d'alors.
"Il me tire par les cheveux hors du lit. Il se met à califourchon, il me donne des coups de poing." Elle se relève, va dans une autre pièce, il la rattrape. "Il me claque la tête deux-trois fois sur le sol. Ensuite il va pour m'étrangler."
Les avocats d'Alain Schmitt mitraillent la médaille d'or aux derniers Jeux olympiques avec l'équipe de France mixte de questions sur de multiples incohérences et changements de sa version de faits. "Je ne sais pas", "je ne peux pas vous l'expliquer", admet à plusieurs reprise la jeune femme, à la peine.
"Globalement, ce que décrit Mme Pinot est largement confirmé par les constatations médicales", estime l'avocat général Olivier L'Etang, en pointant des explications "évolutives" des deux côtés.
Comme en première instance, l'accusation a requis un an de prison avec sursis pour Alain Schmitt. Résultat le 10 juin.
J.Goergen--LiLuX