Allemands et Israéliens se recueillent, 50 ans après le "massacre de Munich"
Le recueillement mais aussi le repentir : les commémorations du cinquantième anniversaire de la sanglante prise d'otages lors des Jeux olympiques de Munich en 1972 réunissent lundi Israéliens et Allemands pour panser les plaies, toujours à vif, de cette tragédie.
La cérémonie principale est prévue à partir de 15h00 (13h00 GMT) en présence du chef de l'Etat allemand Frank-Walter Steinmeier, de son homologue israélien, Isaac Herzog et d'environ 70 proches de victimes.
L'événement menaçait de tourner au fiasco avec la menace de boycott de familles qui se sont battues durant des décennies pour obtenir de l'Allemagne un montant d'indemnisation jugé suffisant.
Un accord in extremis est intervenu la semaine dernière.
"Qu'il ait fallu pour arriver à cette réconciliation ces derniers jours est vraiment honteux", a admis M. Steinmeier devant le président israélien reçu dimanche à Berlin.
Après des décennies de silence, les autorités allemandes sont prêtes à aller plus loin et à endosser la responsabilité des nombreux ratés qui ont entouré l'attaque commise par un commando palestinien, au cours de laquelle onze athlètes israéliens avaient été tués.
Face aux familles des victimes qui réclament des excuses, M. Steinmeier pourrait prononcer les mots attendus.
Lors d'une première cérémonie, lundi matin, au village olympique où avait débuté la prise d'otage, le maire de Munich, Dieter Reiter, a présenté ses excuses pour les "erreurs capitales" commises alors.
"Je suis désolé pour cela et je m'excuse pour le fait qu'après l'attaque, ce qui aurait été exigé par l'humanité n'a tout simplement pas été fait - admettre les erreurs et en assumer la responsabilité", a ajouté l'élu bavarois.
- "Erreur" -
L'attaque, au onzième jour des Jeux de Munich, a marqué l'histoire de l'Olympisme d'une tâche indélébile.
Huit membres de l'organisation palestinienne Septembre noir avaient attaqué à l'aube la délégation israélienne dans son logement du village olympique.
Tuant deux athlètes israéliens, ils en avaient pris neuf autres en otage, espérant les échanger contre plus de 200 prisonniers palestiniens.
Après de longues heures de négociations, l'intervention des services de sécurité allemands sur la base militaire de Fürstenfeldbruck, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Munich, s'était finie dans le sang.
Les neuf otages ont été tués au cours de l'opération, ainsi qu'un policier ouest-allemand. Cinq des huit preneurs d'otages ont été abattus et les trois autres capturés.
La prise d'otages a fait au total 18 morts. De nombreux médias, dans le monde entier, parlent aussitôt du "massacre de Munich".
Les "Jeux de la Joie", censés faire oublier ceux organisés à Berlin en 1936, sous le régime nazi, ont tourné à la déroute.
M. Steinmeier a indiqué dimanche qu'il comptait reconnaître "certaines erreurs de jugement, certains comportements erronés, certaines fautes commises" par les autorités de son pays.
- "A l'abattoir" -
La liste des griefs est longue.
Les alertes des services de renseignements sur un risque d'attaque durant ces JO ont été ignorées et la sécurité négligée.
L'assaut de la police a été mal préparé. "Ils n'ont pas fait la moindre tentative de sauver des vies", s'était emporté Zwi Zamir, alors chef des services secrets extérieurs (Mossad), dans un compte-rendu déclassifié en 2012.
Alors que la polémique sur le fiasco de l'opération policière faisait déjà rage, le Comité international olympique (CIO) avait décidé de ne pas interrompre les JO.
"Les otages étaient conduits à l'abattoir et les Jeux ont continué", s'est indigné dimanche le président israélien Isaac Herzog.
Les proches endeuillés se sont "heurtés à un mur" chaque fois qu'ils ont tenté d'obtenir des réponses de l'Allemagne ou du CIO, a-t-il encore décrit.
"Vous ne savez pas ce que nous avons enduré durant des 50 dernières années", a confié à l'AFP Ankie Spitzer, dont le mari Andrei était l'un des entraîneurs tués à Munich.
Le gouvernement d'Olaf Scholz a accepté de débloquer une enveloppe de 28 millions d'euros, en partie versée par la Bavière et la ville de Munich, au profit des familles de victimes.
Berlin proposait jusqu'alors 10 millions d'euros, incluant les quelque 4,5 millions déjà versés en 1972 et 2002.
"Pendant bien trop longtemps, nous n'avons pas voulu reconnaître que nous avions aussi notre part de responsabilité", a concédé dimanche le président allemand. "C'était à nous d'assurer la sécurité des athlètes israéliens".
P.O.Ferreira--LiLuX