Foot: face aux affaires, Le Graët attendu au ministère
Un "moment d'échange" avec de lourds dossiers à deux mois du Mondial: Noël Le Graët est attendu vendredi au ministère des Sports, au moment où le patron de la Fédération française de football est en butte à d'embarrassantes informations de presse sur son management et son comportement avec des employées.
Si la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a sollicité le dirigeant de 80 ans et sa directrice générale, Florence Hardouin, pour une réunion qui ressemble bien à une convocation, c'est pour aborder "différents sujets", des débordements de supporters à la transition énergétique en passant la prochaine Coupe du monde au Qatar (20 novembre-18 décembre). Mais peut-être aussi parce que l'actualité l'imposait.
"Je ne les reçois pas pour prendre le thé, je ne les reçois pas pour m’entendre dire que tout va bien. Je les reçois car j’ai besoin d’écouter ce qu’ils ont à me dire", déclare la ministre dans un entretien publié jeudi soir sur le site du Parisien.
La semaine dernière, la gestion mais aussi la personnalité du Breton ont été lourdement critiquées dans un article du mensuel So Foot évoquant, sur la foi de témoignages anonymes, l'envoi par Le Graët de SMS à caractère sexuel à des employées de la FFF.
La Fédération a réagi jeudi, après la réunion de son comité exécutif, en annonçant le dépôt d'une plainte "en diffamation contre le magazine So Foot en raison des imputations gravement diffamatoires" de l'article.
"Je ne minimise rien de ce qui a été restitué par So Foot", a dit de son côté Amélie Oudéa-Castéra au Parisien.
Aucune prise de parole de la ministre ou du patron de la FFF ne sont attendues après leur entretien vendredi, programmé avant 10h00 selon l'agenda ministériel.
L'affaire, si elle est avérée, est épineuse pour la "3F", remise sur pied par Le Graët après le cauchemar de la grève des Bleus à Knysna au Mondial-2010, et auréolée du sacre planétaire huit ans plus tard à Moscou.
- "Inaction" sur le harcèlement -
Selon une source interrogée par So Foot, plusieurs femmes auraient démissionné ces dernières années de l'instance car elles se sentaient "harcelées sexuellement, mais aussi moralement".
De son côté, le syndicat des joueurs professionnels UNFP a déploré "l'inaction" de la Fédération dans la lutte contre le harcèlement, "sexuel ou pas". Il espère que la rencontre de vendredi pourra être "l'occasion d'en finir avec le harcèlement, cette plaie du football français".
Interrogé sur la situation, le sélectionneur des Bleus Didier Deschamps a reconnu jeudi que le climat actuel de la FFF n'était "pas le plus apaisé". Mais il a aussi déploré ce qu'il a qualifié de recherche du "buzz".
"Vous savez ma relation avec le président, je lui ai parlé longuement hier (mercredi). Que voulez-vous que je vous dise ?", a-t-il déclaré en conférence de presse. "Le président va bien, il est en pleine forme."
Arrivé en 2011 et réélu en 2021 pour un nouveau mandat, Le Graët a pour lui d'avoir présidé au sursaut de l'équipe de France masculine, grâce au duo fidèle qu'il forme avec Deschamps, tout en redressant les finances fédérales via un contrat record avec l'équipementier Nike.
La pratique féminine s'est aussi développée, avec un envol du nombre de licenciées, malgré les échecs des Bleues au Mondial-2019 à domicile (quarts de finale) puis à l'Euro féminin (demies) l'été dernier.
- Sorties hasardeuses -
Ses détracteurs évoquent de leur côté un exercice autoritaire du pouvoir, un désintérêt pour le foot amateur, ce qu'il conteste, ou encore une gouvernance minée par les conflits autour de la clivante Florence Hardouin.
Côté communication, "NLG" s'est rendu coupable de sorties hasardeuses en minimisant le problème de l'homophobie dans les stades ou du racisme dans le foot, qui "n'existe pas ou peu" selon lui. Sa déclaration aux relents sexistes sur les dissensions entre Bleues qui "peuvent se tirer les cheveux" tant qu'elles gagnent, a aussi fait des vagues.
Mais le "Menhir", PDG fondateur du groupe Le Graët (780 salariés), spécialisé dans la pêche, les conserves et les surgelés, reste imperturbable: remis d'une leucémie lymphoïde annoncée en 2018, il a balayé mardi la possibilité de passer la main en cours de mandat.
"Je n'ai pas du tout l'intention d'arrêter. Si ma santé reste stable, si je vais bien, il n'y a absolument aucune raison que j'arrête. Je suis très bien à mon poste et tout le monde m'aime bien. J'ai la chance d'être apprécié", a-t-il affirmé au quotidien L'Equipe.
E.Scholtes--LiLuX